Les vaches à l’école

C’est une directrice d’une école laïque dans un petit village du Cantal. Et elle était drôlement furieuse parce que tous les jours, le père Eugène, pour gagner du temps, faisait traverser la cour de l’école à ses vaches. Et la cour de récréation était dans un drôle état, après leur passage…
– Je leur ai écrit plusieurs fois, à la Mairie ! Ils ne m’ont jamais répondu ! Bon, demain, s’il revient, l’Eugène va m’entendre !

Et le lendemain, comme d’habitude, le père Eugène arrive avec ses vaches.
– Allez, les petites !
– Dites donc, père Eugène, vous allez me faire le plaisir de prendre vos vaches et de faire le tour ! Maintenant c’est terminé, de traverser la cour ! Enfin, quand même, ici c’est une école !
– Eh, mais ch’peux point faire le tour, moué !
– Ah oui ? Et pourquoi ça ?
– Ch’ peux point faire le tour parce que ça me fait faire un cré bon dieu d’détour… L’école, c’est le chemin le plus court. Vous vous rendez compte, à pied, sans chien, avec un troupeau de vaches ? Mais si ch’ fais le tour, j’ me rallonge d’au moins cinq cents mètres, ma bonne dame ! Moi, ch’ peux point !
– C’est bien beau, tout ça, mais regardez-moi dans quel état vous me mettez cette cour ! C’est pas Dieu possible ! Je ne sais pas, moi ! Je veux bien que vous passiez par là, mais alors revenez nettoyer !
– Eh, c’est qu’ moué j’ n’ai point l’temps, vous comprenez…
– Ah il faut trouver un moyen, ça ne peut pas continuer comme ça ! Vos vaches, elles ne peuvent pas se retenir ?
– Ah ben vous en avez d’ bonnes, les gens d’Ia ville… Vous savez, les vaches, pouvez toujours leur expliquer : elles font ce qu’elles veulent !
– Et si vous leur mettiez un sac sous la queue ?
– Un sac sous la queue ?
– Oui, vous voyez, un genre de petite bourse : ça ferait moins de saletés !
– Ben moué, ça fait tantôt soixante-dix ans que j’en ai deux sous la queue, et c’ n’est point pour ça que j’arrive à faire dedans !